Plan séquence Crossing Paris
Effets vidéo WAOUHH!!, l’exemple avec
le plan séquence “Crossing Paris”
Notre copain, partenaire droniste et Chef Op Victor Cavaillole a récemment partagé sa dernière réalisation sur les réseaux !
C’est un petit “ovni audiovisuel” comme il le décrit, dans lequel on retrouve en version home-made et ingénieuse, différents effets qu’il est possible d’intégrer dans toutes réalisations audiovisuelles (si cela sert le storytelling bien entendu ! ;))
La sortie du film Crossing Paris est l’occasion de décortiquer ensemble ces différentes techniques de prise de vue et de post-production.
On a d’abord fait rapidement l’exercice de notre côté, puis Victor est venu nous raconter les dessous de son projet vidéo.
On commence par une explication (ou un rappel pour les experts de l’audiovisuel).
Slowmotion, timelapse, stop-motion… : de quoi parle-t-on ?
Procédés techniques prisés des “filmmakers”, les slowmotion, timelapses, hyperlapses et autres stop-motion sont des techniques de prise de vue photographiques qui jouent sur deux principaux paramètres :
- Une cadence de prise de vue différente des 25 images/seconde habituelles en vidéo
- Des éventuels effets de mouvements ou de changements de cadre
L’objectif de ces différentes techniques vidéos ?
En variant ainsi les cadences de prises de vue, pouvant aller de 150 images/secondes ou à l’inverse 1 image toutes les 5 minutes par exemple, et en y ajoutant ou non des effets de mouvements, on obtient des rendus artistiques assez innovants et pouvant servir de différentes façons la narration.
Point rapide sur certains de ces effets, que l’on retrouve pour l’essentiel dans ce film :
Le slowmotion est tout simplement le fait de jouer à 25 images secondes (soit la cadence imposée par le format vidéo en France) une séquence qui a été filmée à une cadence plus élevée. Pour une action tournée à 100 images/secondes par exemple, il en résultera un effet de ralenti 4 fois plus lent que le temps réel, de manière tout à fait fluide.
Le timelapse est une séquence vidéo accélérée, constituée de photographies prises à intervalles réguliers, qui montre en quelques secondes l’évolution d’une scène se déroulant dans la réalité sur une période beaucoup plus longue : coucher de soleil, éclosion d’une fleur, suivi de chantier… La caméra peut être fixe sur trépied, ou en léger mouvement.
Un slider motorisé permettra par exemple de déplacer automatiquement et à intervalles très réguliers l’appareil sur un petit rail, de quelques millimètres entre chaque photo.
Ce principe n’est autre qu’une illusion du temps en accéléré, formée par le défilement rapide des images et permettant d’avoir des effets de filés de lumières ou de mouvement grâce à des temps d’ouverture importants offerts par la photographie (impossibles à avoir naturellement en vidéo).
L’hyperlapse est le même procédé, mais avec une caméra se déplaçant à intervalles réguliers, non plus de quelques millimètres, mais de plusieurs mètres, et proposant ainsi en complément d’un voyage dans le temps, un voyage dans l’espace. La technique est alors très particulière car les déplacements de la caméra sont manuels et à intervalles et distances extrêmement réguliers, pour donner un rendu suffisamment fluide et esthétique. De plus, l’appareil se déplaçant, les perspectives évoluent. Toute la difficulté consiste alors à faire également évoluer le cadrage autour du sujet visé, pour un rendu gracieux.
Complexe à mettre en oeuvre, mais très impliquant visuellement !
Le dronelapse… est un hyperlapse réalisé à l’aide d’un drone ! Les déplacements de caméra sont donc effectués par le drone, volant à très faible vitesse pour permettre en 20 minutes de prendre 200 clichés sur une trajectoire de 300m par exemple, pour 8 secondes de vidéo “accélérée” au final !
Sa nacelle de stabilisation (gimbal) permet d’amortir les éventuelles variations de mouvement et l’IA du drone permet en temps réel de “tracker” un élément du cadre que l’on aura préalablement défini, pour ré-orienter l’axe de la caméra selon l’avancement du drone et l’évolution des perspectives qu’il induit.
Enfin, concernant le stop-motion, c’est un procédé vidéo qui a le charme de l’ancien 🙂
À la manière des vieux films du début du XXème siècle ou de certains dessins-animés ou films d’animation en pâte à modeler, le réalisateur va travailler image par image sur le déplacement de l’objet ou du personnage immobile auquel il souhaite donner vie.
Appliqué à la prise de vue de sujets réels (non dessins animés ou studio), ce procédé n’est alors délibérément pas précis, pour donner un effet surréaliste au déplacement du sujet, un côté cartoon ou jeu vidéo.
Focus sur ces techniques avec la vidéo “Crossing Paris”
Live Drone/Skunati: Victor, tu as partagé la semaine dernière ta dernière création, un faux plan séquence tourné sur Paris qui combine différentes techniques de film. Comment t’es venue l’idée et l’envie de réaliser ce projet ?
Victor : Mon projet ? Faire un film court et ambitieux sur Paris, à partir des outils dont je disposais, dans un calendrier qui n’impacterait pas mon emploi du temps professionnel.
C’est en voulant répondre à ces objectifs que l’idée m’est venue : faire une vidéo qui combinerait des séquences filmées à des moments différents. Cela me permettait aussi de faire évoluer mes propositions visuelles et techniques de prise de vues tout au long du film.
Pour mon projet, je voulais montrer qu’en étant créatif et débrouillard, il était possible de réaliser – plus modestement bien sûr – ce que d’autres font avec plus de budgets et/ou de moyens techniques, comme Rob Whitworth par exemple, expert du genre.
Live Drone/Skunati : Comment as-tu trouvé les différents partenaires pour ce projet ?
Victor : Concernant les différents lieux de tournage fixes dans la Capitale ex: le Centquatre, Arkose, j’ai fait les démarches traditionnelles de demande d’autorisation. Au Louvre ou encore le long des quais de Seine : le film réalisé n’ayant pas de vocation commerciale, aucun accord n’était obligatoire.
Pour les lieux privés, j’ai évidemment obtenu l’autorisation de filmer les intérieurs de la part des propriétaires. Mais ils étaient plutôt très partants pour me laisser valoriser leurs lieux – comme Live Drone d’ailleurs ! 🙂
Quant aux comédiens et artistes à l’écran, ce sont des amis qui ont -très- gentiment accepté de participer à ce projet audiovisuel un peu fou. Pour les créatifs, le deal était clair: ils avaient carte blanche pour s’exprimer artistiquement !
Ils m’ont d’ailleurs tous surpris avec des propositions super riches, plus ou moins loufoques, que j’ai donc intégrées comme telles dans ma vidéo.
Live Drone/Skunati : Peux-tu nous raconter comment tu as réalisé certaines de tes scènes ?
La scène du vélo puis du scooter par exemple, comment as-tu fait ça ?
Victor : Le vélo a été la première séquence filmée de tout le projet. Lorsque le cycliste sort de la boutique, je l’ai filmé en stop-motion depuis un trépied, puisl’ai suivi avec un gimbal (stabilisateur caméra) en le filmant toujours image par image jusqu’au moment où il saisit le guidon du véo : j’ai alors accroché ma caméra sur sa selle à l’aide d’un Gorillapod et lui ai demandé de marcher à côté tout en le poussant.
Pour le scooter, j’ai utilisé 2 méthodes :
- Lorsqu’il arrive et repart : le film est réalisé image par image depuis un trépied puis d’un gimbal.
- En revanche, lorsqu’il roule c’est un ami machiniste qui a monté un dispositif un peu bricole mais très efficace, à l’aide d’un gimbal et d’un bras magique fixé au porte bagage d’un Vélib’. Cette séquence a été filmée puis accélérée au montage pour un effet de vitesse.
Pour lier le deux, il m’a fallu raccorder la position et l’échelle pour une bonne transition entre ces 2 séquences.
Live Drone/Skunati : Peux-tu nous dire comment tu es arrivé à fusionner les deux environnements dans la scène du bar ?
Victor : J’avais dans l’idée d’avoir à l’écran 1 seul et unique bar fictif, qui devait être l’assemblage de deux lieux distincts. Pour un rendu symétrique et une véritable perspective : il y a eu au préalable un travail d’agencement : tout devait être identique, l’idée était de créer un véritable effet miroir.
J’ai utilisé des repères du quadrillage caméra pour mémoriser les points de perspective sur chaque site, que j’ai superposé à chaque prise de vue.
Pour unifier le tout, l’important était de relier les deux lieux grâce à l’envoi du shaker entre le barman et la barmaid. Pour y arriver, une personne fantôme était chargée à chaque tournage de l’envoi de l’accessoire, en tâchant de respecter une certaine hauteur pour un raccord parfait. Pas simple !
Live Drone/Skunati : Et l’intro dans nos bureaux, quelle était ton idée ?
Victor : Je voulais profiter de votre installation dans vos chouettes nouveaux bureaux pour introduire le film avec un décor “nouvelles technos” et innovation grâce à vos gros drones, caméras 360° dernière génération et autres casques VR, et une technique de prise de vue qui l’est tout autant grâce au drone racer fpv.
Live Drone/Skunati : La scène finale d’un Paris futuriste et catastrophiste est complètement surréaliste ! Tu t’es fait aider pour réaliser ce SFX digne de Blade Runner ?
Victor : C’est Théo Di Malta, un ami et artiste de la 3D et du matte painting qui a travaillé sur un plan en drone (qu’on appelle dans ces cas-là un “plate” car destiné à des retouches SFX), tournée par Live Drone/Skunati. Il a dans un premier temps ajouté et construit son matte Painting, puis après avoir tracké le mouvement de caméra il a pu ajouter ses éléments 3D. Il y a eu un gros travail aussi sur la colorimétrie et l’ambiance visuelle (éclairs, fumée, source de lumières etc..) pour accentuer ce futur très dark.
Un travail de fourmi, à la fois très technique et très artistique comme on peut le voir sur sa démo (à 3:30).
Live Drone/Skunati : Et la bande son ?
Un autre de mes amis ingé son, Yannis Do Couto, pour travailler le sound design (les bruitages). Ils apportent vraiment un gros plus sur ce type de film très court et punchy. Ils doivent se mélanger à la musique et enrichir la narration. On a mélangé prises de son réelles et bruitages de sa propre banque de sons. On a eu plusieurs passes pour arriver au résultat voulu, avec autant d’exigence apportée que sur l’image.
Live Drone/Skunati : Au final, que retiens-tu d’un projet comme celui-là ?
Victor : Travailler dans la contrainte, avec cet objectif d’imbriquer toutes ces séquences très différentes, avec peu de matériel, était un véritable puzzle créatif !
Cela a pris pas mal de temps en post-production car je n’avais jamais fait ça auparavant, alors pas mal d’obstacles venaient s’ajouter à ce casse-tête audiovisuel. Mais c’est surtout grâce à l’aide de mes amis et de personnes qui ont chacun accepté de mettre leur pièce à l’édifice que j’ai pu bricoler ce projet !